La Vôge agricole : une histoire de bocages, de prés et d’innovation silencieuse
Des terres humides, un terroir singulier
Ce n’est pas par hasard si le terme « Vôge » viendrait du gaulois vogesus, là où l’eau abonde. Les sources et ruisseaux omniprésents, les sols parfois lourds et argileux, ont imposé à l’agriculture locale une dominante herbagère. L’élevage bovin (race montbéliarde, abondance puis charolaise) s’est imposé dès le Moyen Âge, avec une prédilection pour la production laitière et fromagère. Le beurre de la Vôge et ses fromages à pâte pressée faisaient dès le XVIII siècle l’objet de ventes vers Épinal ou Vesoul (Source : Archives départementales des Vosges).
- Au XIX siècle, près de 80% des terres étaient dédiées aux prés et pâturages (Statistique agricole départementale, 1875).
- La polyculture a longtemps coexisté avec l’élevage : seigle, froment, pommes de terre, chanvre et vergers.
- Les mares de pâturage (« trous à bœufs ») témoignent encore aujourd’hui de l’effort d’adaptation à l’excès d’eau.
L’organisation rurale : un paysage façonné par l’homme
Le système agraire a longtemps reposé sur le bocage : haies vives, rangées de hêtres, fossés, et chemins creux sont la marque de la Vôge. Outre la délimitation des parcelles, ces éléments naturels étaient essentiels pour abriter le bétail, capter l’eau, enrichir les sols par la litière et fournir du bois de chauffage. Le mode de vie rural a laissé de nombreuses traces dans la toponymie locale : les « prés hauts », « fonds de la prairie », ou encore les « champs du Fossé ».
Avec l’après-guerre, la mécanisation et le remembrement ont profondément remanié ces paysages, mais la trame bocagère demeure identitaire.
Agriculture et village : une économie en réseaux
- Au XIX siècle, 70% de la population active de la Vôge travaillait la terre (Cahiers de la Société Philomatique Vosgienne).
- Les foires mensuelles (Bains, Fontenoy-le-Château, Xertigny) rythmaient achats et échanges de bétail.
- L’entraide au sein de la « communauté de culture » structurait la vie villageoise — corvées de fenaison, fêtes de la Saint-Jean, veillées autour du battage.
Aujourd’hui, la filière laitière reste forte (la laiterie de Bains-les-Bains collecte encore plusieurs millions de litres de lait chaque année), même si le nombre de petites exploitations a fortement décru — moins de 25 exploitations en activité sur l’ensemble de La Vôge-les-Bains en 2023 (Source : Chambre d’Agriculture des Vosges, 2023).